Monsieur le Président de la neuvième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, M. l’Ambassadeur Esmaeil Baghaei Hamaneh,
Chers représentants des Parties à la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac,
Chers représentants des États non Parties à la Convention-cadre de l’OMS et chers observateurs,
Mesdames, Messieurs,
Au nom du Secrétariat de la Convention, je vous souhaite la bienvenue à cette neuvième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac.
C’est la première fois que je m’adresse à la Conférence des Parties, et je dois vous dire que c’est un honneur que de se voir confier la responsabilité de diriger le Secrétariat de la Convention.
Le cours normal des choses aurait voulu que nous nous rencontrions l’année dernière, mais le monde a malheureusement été frappé par une crise sans précédent, causée par la pandémie de COVID-19. Elle a eu un impact significatif sur nos vies et les chiffres qui lui sont associés sont terribles, avec plusieurs millions de décès à ce jour.
Alors que nous nous apprêtons à tenir notre toute première session virtuelle de la Conférence des Parties, je me dois de revenir sur les contraintes particulières auxquelles la pandémie nous a soumis. Nous sommes habitués à travailler à distance et à nous réunir virtuellement, tel que c’est le cas aujourd’hui, grâce aux technologies numériques. Mais je regrette profondément que nous ne puissions pas être assis ensemble dans la même salle et j’espère sincèrement que nous pourrons mettre à profit notre esprit d’entraide fraternelle dans le cadre de notre travail à des milliers de kilomètres les uns des autres. Cela pourrait bien devenir la « nouvelle normalité » du travail et nous comptons sur notre souhait collectif de réaliser des progrès en matière de protection de la santé publique pour nous donner la flexibilité nécessaire à la réussite de la session.
Pour en revenir à la pandémie de COVID-19, celle-ci n’est pas arrivée seule, mais au milieu de nombreux autres problèmes de santé mondiaux. En réalité, nous sommes en plein cœur d’une syndémie ayant des conséquences catastrophiques pour les plus vulnérables d’entre nous.
En cette période de crise, l’Organisation mondiale de la Santé a indiqué que les fumeurs sont davantage susceptibles de développer une forme plus sévère de COVID-19. Et des effets négatifs similaires sont documentés pour les personnes atteintes de maladies non transmissibles, dont certains des principaux facteurs de risque sont le tabagisme et l’exposition à la fumée secondaire.
Vous avez sans doute parfaitement conscience qu’une autre Conférence des Parties se déroulant actuellement, la COP 26 sur les changements climatiques, attire toute l’attention des médias du monde entier. Mais n'oublions pas qu’il existe d’importantes similitudes en arrière-plan de la décision des États membres des Nations Unies d’adopter, en 1992, la Convention-cadre sur les changements climatiques - et les accords mondiaux ultérieurs - et de la décision des États Membres de l’Organisation mondiale de la Santé d’adopter la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac en 2003.
Les deux traités visent à protéger les générations présentes et futures. Nous savons que le tabac nuit à l’environnement tout au long de son cycle de vie, de sa culture aux déchets produits par sa consommation, contribuant à la déforestation, à la désertification, aux émissions de gaz à effet de serre et à la pollution par le plastique. Mais le point commun le plus flagrant est que le changement climatique et l’épidémie de tabagisme sont tous deux des phénomènes qui sont causés par l’homme et qui sont évitables. L’un est complexe est nécessite de nombreuses solutions différentes avant d’atteindre l’objectif fixé, tandis que l’autre devrait être plus facile à résoudre.
De fait, nous avons déjà entre nos mains la solution pour mettre fin au lourd tribut évitable payé à l’épidémie de tabagisme. Nous disposons du bon outil pour ce faire, à savoir : la Convention-cadre de l’OMS. Et nous disposons des bonnes personnes pour la mettre en œuvre : vous toutes et tous.
Les Parties à la Convention représentent 90 % de la population mondiale. Mais la mise en œuvre des mesures importantes que prévoit le traité n’est toujours pas aussi avancée qu’elle devrait l’être. La semaine dernière, nous avons pu lancer le Rapport de situation mondial 2021, grâce aux informations fournies par la majorité des Parties pour le cycle de notification 2020. Il met en évidence des progrès modestes, mais souligne une fois de plus que le manque de ressources et l’ingérence incessante de l’industrie du tabac constituent les principaux obstacles à l’avancement de la mise en œuvre des mesures de lutte antitabac.
Lors de la précédente session de la Conférence des Parties, vous avez franchi une étape importante en adoptant la Stratégie mondiale pour accélérer la lutte antitabac 2019-2025. La Stratégie mondiale vise à faire avancer le développement durable par la mise en œuvre de la Convention. En outre, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 a inclus la cible 3.a, qui appelle les Parties à renforcer la mise en œuvre de la Convention-cadre de l’OMS comme moyen d’atteindre la cible 3.4 des Objectifs de développement durable, visant à réduire d’un tiers les décès prématurés dus à des MNT d’ici 2030. Par conséquent, il apparaît très clairement que la lutte antitabac est non seulement une question de santé mais aussi de développement durable au sens large.
Il y a trois ans, le Protocole pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac est entré en vigueur. Il compte 63 Parties – et bientôt 64 - ce qui est encore peu comparé aux 182 Parties que compte la Convention-cadre de l’OMS. Le Protocole s’avère essentiel à la protection des progrès que nous avons réalisés, car le commerce illicite des produits du tabac compromet de nombreuses mesures de la Convention, notamment celles relatives à la taxation, l’outil individuel le plus puissant pour réduire la consommation de tabac.
En réalité, l’augmentation des taxes sur le tabac ne permet pas seulement de faire ployer la courbe de la consommation de tabac, elle permet également de dégager des recettes bien nécessaires aux pays, qui commencent tout juste à se relever de la pandémie. La lutte antitabac dans son ensemble devrait faire partie intégrante des efforts visant à « reconstruire en mieux » afin de contribuer à une meilleure santé et à une meilleure résilience des populations face aux crises sanitaires présentes et futures.
L’industrie du tabac et tous ceux qui défendent ses intérêts n’ont pas ménagé leurs efforts, même en ces temps difficiles. Bien au contraire, une fois de plus, ils en ont profité pour prospérer et semer la confusion. Alors que nous nous débattons en plein cœur de la pandémie, l’industrie du tabac redouble d’efforts pour offrir son prétendu soutien sous le couvert de la « responsabilité sociale des entreprises », parfaitement consciente que de nombreux gouvernements se trouvent dans une situation désespérée du fait de leur manque de ressources pour aider leurs communautés à traverser la pandémie.
Et, bien sûr, l’industrie n’a de cesse de se faire passer pour La Solution, avec un grand S. La Solution à ce problème que NOUS, experts en santé publique et activistes engagés n’avons pas encore été capables de résoudre, selon les dires de l’industrie.
Ce problème qu’ELLE a créé et fait perdurer.
L’industrie du tabac est à l’origine de l’épidémie de tabagisme et continue d’user de stratagèmes pour saper, chaque fois qu’elle le peut, nos efforts visant à faire progresser la santé publique.
Aujourd’hui, l’industrie du tabac, en désespoir de cause, prétend que la Convention-cadre de l’OMS n’est plus adaptée aux besoins. Pourtant, étrangement, l’industrie voit la nécessité de continuer à s’ingérer dans la mise en œuvre de la Convention, comme l’ont clairement indiqué les Parties dans leur rapport. Et, comme si s’ingérer de lui suffisait pas, l’industrie s’emploie soigneusement à semer la discorde entre nous, en exagérant sur les différences que nous pouvons avoir dans nos approches, au détriment de nos objectifs et nos succès communs.
Mais je tiens à répéter ce que j’ai dit lors d’un autre événement récent : il y a beaucoup plus de choses qui nous unissent que de choses qui nous séparent. L’industrie du tabac cherche désespérément à instaurer cette rhétorique de la division pour nous affaiblir, et y prêter attention nous rend effectivement plus faibles.
Permettez-moi de conclure en exprimant ma gratitude à toute l’équipe du Secrétariat, pour les longues heures qu’elle a consacrées à la préparation de cet événement virtuel, ainsi qu’à l’OMS, pour le soutien apporté aux niveaux national, régional et mondial, tant sur le plan technique qu’opérationnel. J’apprécie tout le savoir-faire et la maîtrise technique ayant permis de planifier et de soutenir cette conférence virtuelle.
Merci à toutes les personnes présentes et à votre engagement indéfectible à protéger la santé publique et à sauver des vies par la mise en œuvre de la Convention-cadre de l’OMS. Ensemble, les yeux rivés sur notre objectif commun, nous sommes plus forts.
Que nos échanges dans le cadre de cette neuvième session soient fructueux.